Je suis un homme malade… Je suis un homme méchant. Un homme repoussant, voilà ce que je suis. Je crois que j’ai quelque chose au foie. De toute façon, ma maladie, je n’y comprends rien, j’ignore au juste ce qui me fait mal. Je ne me soigne pas, je ne me suis jamais soigné, même si je respecte la médecine et les docteurs.
En plus, je suis superstitieux comme ce n’est pas permis ; enfin, assez pour respecter la médecine. Je suis suffisamment instruit pour ne pas être superstitieux, mais je suis superstitieux. Oui, c’est par méchanceté que je ne me soigne pas. Ça, Messieurs, je parie que c’est une chose que vous ne comprenez pas. Moi, si ! Évidemment, je ne saurais vous expliquer à qui je fais une crasse quand j’obéis à ma méchanceté de cette façon-là ; je sais parfaitement que ce ne sont pas les docteurs que j’emmerde en refusant de me soigner ; je suis le mieux placé pour savoir que ça ne peut faire du tort qu’à moi seul et à personne d’autre.
Et, malgré tout, si je ne me soigne pas, c’est par méchanceté.
J’ai mal au foie. Tant mieux, qu’il me fasse encore plus mal !..
Un spectacle intimiste, invitant les spectateurs à observer de très près l’étrange personnage de Dostoïevski en descendant dans la cave où il a choisi de se vivre. Souffrant d’une misanthropie quasi pathologique, il a en effet décidé de se retirer du monde pour écrire ses « carnets ». Depuis 20 ans dans sa cave, cet homme-rat ressasse sans cesse le souvenir de l’échec de sa vie : une femme-brebis égarée qu’il aurait voulu ramener dans le troupeau.
André Gide a dit à propos de ce roman : « Je crois que nous atteignons, avec les Carnets du soussol, le sommet de la carrière de Dostoïevski. Je le considère, ce livre ( et je ne suis pas le seul ), comme la clé de voûte de son oeuvre entière.»